Autour de la terre

Parmi les 19 compagnons français de Magellan, un Breton et un Normand ont accompli le premier tour du monde. 



Parti du port andalou de Sanlúcar de Barrameda avec 237 hommes répartis sur cinq navires, le 20 septembre 1519, pour une première « circumnavigation » du monde, le navigateur et explorateur Fernand de Magellan n’était pas un sujet de Charles Quint. Né à Porto aux environs de 1480, de son vrai nom Fernão de Magalhães, il était un sujet de Manuel Ier, Le Fortuné, le roi qui avait installé son palais sur les rives du Tage. C’est ce souverain qui avait lancé une expédition maritime pour contourner l’Afrique et gagner l’Inde, terre aux épices. Né dans une prestigieuse famille de la noblesse portugaise, Magellan commence sa carrière d’aventurier à son service. En 1505, il explora les côtes de l’actuelle Malaisie et les îles voisines, riches en girofles et en noix de muscade.

Mais quand il conçut le projet de gagner les îles des épices par l’ouest, en passant sous le continent sud-américain, il n’en souffla pas un mot au roi portugais avec lequel il n’était pas en très bons termes et alla proposer ses services au jeune Charles Quint.

C’est ainsi, aux alentours de 1518, que se mit en place une expédition internationale sous contrôle espagnol. Parmi les 237 hommes d’équipage des navires partis de Sanlúcar de Barrameda pour accomplir le premier tour du monde de l’histoire, il y avait principalement des Espagnols et des Portugais, mais également des Génois, des Allemands, des Anglais, des Grecs et même dix-neuf Français que Bruno d’Halluin a recensés.

Roman d’aventures

Parmi les compagnons français de Magellan, il y avait cinq Bretons, trois Normands, deux Gascons, un Champenois, un Tourangeau, un Aunisien de La Rochelle, un Angevin, un Picard de Bourgogne, un Lorrain et un possible Béarnais. Leur histoire se lit comme un roman d’aventures. Dans un ouvrage intitulé Juste le tour du monde (Gaïa, 2019). Bruno d’Halluin s’est d’ailleurs attaché à restituer le destin d’un marin du Croisic et d’un charpentier d’Évreux qui ont survécu à l’expédition. On se souvient que le malheureux Magellan n’accomplit jamais le tour du monde dont il avait rêvé, mortellement blessé par une flèche empoisonnée à Mactan, une île de l’actuel archipel philippin, le 15 avril 1521, lors d’un accrochage avec les indigènes. C’est le capitaine basque Juan Sebastián Elcano, un marin de Getaria, un port de pêche du rivage cantabrique, qui le fit à sa place, à bord de la nef Victoria, rentrée à Séville le 8 septembre 1522, presque trois ans après son départ. Parmi ses hommes d’équipage, il n’y avait aucun sujet de François Ier. À son bord, le Breton du Croisic Stéphane Bihan était mort le 6 août, par 31°N, après avoir accompli la première circumnavigation de l’histoire. Parmi les survivants français de l’expédition, un seul autre a accompli le tour du monde : le Normand Richard Deffaudis, capturé par les Portugais au large des îles du Cap-Vert, le 14 juillet 1522, et emprisonné à Lisbonne avant d’être relâché et de regagner l’Espagne où il a fini ses jours.

Sébastien Lapaque – Le Figaro – Juin 2022